jeudi 8 mai 2008

Pour le Irish Labour, le renouveau passe par l’Europe


Photo officielle de la campagne référendaire


Après la douche froide des élections largement et cruellement perdues en Mai 2007, le Labour irlandais s’est mis au travail, pour entamer sa rénovation. Son leader charismatique, Pat Rabitte, en accord avec les cadres et les militants du parti, a rapidement démitionné pour vite tourner la page, et mieux faire place au renouveau.
Le résultat des travaux a été dévoilé le 7 avril dernier, soit moins d’un an après les élections perdues : tout d’abord, un programme de réformes ambitieuses de l’Etat Irlandais et du fonctionnement de la vie politique basé sur une plus grande place accordée aux militants et aux citoyens dans le processus démocratique, des mesures de lutte contre la corruption et les conflits d’intérêts public / privé ; également, la redéfinition de la base traditionnelle de l’électorat du Labour, élargi à « toutes les catégories de travailleurs », non plus seulememt les ouvriers mais aussi les indépendants, les employés, cadres, etc... selon les mots de Eamon Gilmore, nouveau leader du parti ; enfin, l’utilisation massive des outils de communication afin de faciliter la pédagogie d’un parti qui se veut résolument ancré dans la modernité, dans son temps, et dans la société au sein de laquelle il évolue.

Malgré une crédibilité accrue, le Irish Labour devra se battre pour prouver à l’Irlande que ses représentants sont capables de mener le pays, et pouvoir revenir aux affaires.

Première bataille : la campagne référendaire sur le Traité de Lisbonne. Le vote est prévu pour le 12 Juin, l’Irlande est le seul pays à consulter directement ses citoyens sur le sujet, et le Irish Labour se prononce résolument pour le Oui.
Le Parti doit faire face à une opposition totalement décomplexée. Il semble que le camps du Oui souffre face à des opposants qui utilisent le traité pour afficher ouvertement un anti-européanisme latent, mais peu populaire tant que l’Union Européenne offrait la manne financière qui aujourd’hui a disparu, mais aussi les largesses en matière de fiscalité des entreprises. Ainsi, le lobby privé se déchaîne : le nouveau Traité est illisible à dessein, trop contraignant, il ne garantie pas la protection dont ce petit pays a toujours bénéficié, et qui en a encore besoin. En bref, l’UE aurait trahi, elle ne supporte pas que l’Irlande puisse bloquer le processus par un vote citoyen, et c’est justement pour cela que les citoyens doivent se saisir de la chance de leur envoyer un signal fort ! Une organisation menée par un richissime mécène s’est même lancée dans la campagne, Libertas, afin d’informer et de protéger les citoyens irlandais de la dérive totalitaire irrémédiable qui va bouleverser leurs vies. En filigrane ou clairement dit, le motif est clair : le Traité de Lisbonne est mauvais pour les affaires.

C'est en partie parce qu’il fait plus de place à l’Europe Sociale et qu’on peut y entrevoir des mécanismes d’entente sur la fiscalité, une ingérence inadmissible pour des entrepreneurs habitués à être choyés et servis selon leurs volontés, en term ede main d’oeuvre docile et abordable notamment.
Dans ce contexte, la tâche du Irish Labour est ardue, et le parti apparaît comme une cible de choix. La campagne est dure, les débats étouffés par le lobby mercantiliste sous couvert de philantropie, et le climat politique est plus lourd que jamais. Un pas décisif a été franchi, le soir du 14 avril : Prionsias de Rossa, l’unique député européen représentant la gauche d’Irlande au Parlement Européen, s’est fait agressé en sortant d’un meeting de campagne, par des partisans du Non, qui l‘avaient déjà importuné au cours de la soirée dans la salle. Un acte démesuré d’autant plus choquant que la vie politique irlandaise n’est pas habituée à ce genre de débordements.

C’est donc peut-être la rançon d’un certain succès, peut-on se dire, osant l’excès d’optimisme ; le prix d’un certain dynamisme retrouvé, malgré la défaite, d’une rénovation rapide, sans détours, sans tabous, réussie ? Le Irish Labour n’a jamais tenu la vedette et pourtant, désormais, certains le voient comme une menace a stopper à tous prix.
C’est aussi un inquiétant développement : le traité de Lisbonne ne remet pas en question les acquis fondamentaux auxquels l’Irlande tient, comme par exemple en terme de non participation à des opérations militaires autres que de maintien de la paix. Pourtant les anti-européens n’hésitent quasi plus devant rien pour défendre leurs vues, et on sait que la violence, toujours, favorise la droite.
Si le Irish Labour fait une belle campagne qui est tout à son honneur, il y perd bien aussi quelques plumes, et la droite pourtant tout aussi euro-enthousiaste n’en tire pas moins son épingle du jeu, faisant elle une campagne discrète profitant que d’autres, plus excessifs, comme toujours, prennent la responsabilité de se salir les mains.


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