A vendre : ambassade de France à Dublin,
1 000 m2, "propriété unique", 60 millions d'euros
LE MONDE 22.01.08 14h24 • Mis à jour le 22.01.08 14h24 LONDRES CORRESPONDANTPendant soixante-dix- huit ans, en plein coeur de Dublin, la France a pu toiser l'ancienne puissance tutélaire britannique. Au plus grand plaisir des Irlandais, la majestueuse résidence de son ambassadeur écrasait celle de son collègue d'Albion : mille mètres carrés au total, dont 400 m2 d'espaces de réception, une entrée monumentale, un grand escalier digne d'un vice-roi et des jardins parmi les plus beaux que compte un pays qui ne manque pourtant pas de verdure.
Ballsbridge, un lieu historique, puisqu'après sa défaite au référendum du 27 avril 1969, le général de Gaulle vint y loger avant de prendre résidence dans la campagne irlandaise.
Installée elle aussi sur Ailesbury Road, mais de l'autre côté, la chancellerie a joué un rôle important dans la lutte pour l'indépendance de l'Eire.
Dans le cadre de la rationalisation de son parc immobilier, le Quai d'Orsay a mis en vente la résidence de Ballsbridge pour soixante millions d'euros. C'est deux fois plus que la maison la plus chère jamais vendue à Dublin. Dans la foulée, le ministère des affaires étrangères entend se séparer aussi de la chancellerie pour vingt millions d'euros.
"APPELER MA FEMME SUR SON PORTABLE"
"Cet immeuble historique est surdimensionné pour l'activité normale d'une ambassade. La résidence est tellement grande que je dois parfois appeler ma femme sur son portable pour pouvoir lui parler. La cession de la chancellerie répond à la nécessité d'installer nos bureaux dans des locaux plus fonctionnels, plus adaptés, plus accessibles au public", déclare l'ambassadeur, Yvon Roe d'Albert, qui a pris ses fonctions il y a trois mois.
Idéalement, le Quai d'Orsay aimerait faire un échange de propriétés. Faute de cela, les deux immeubles seront cédés, ensemble ou séparément. "C'est une propriété unique", insiste l'agent immobilier chargé de la vente.
L'événement a mis en émoi les nouveaux super riches du "dragon celtique" qui n'entendent pas se faire damer le pion par un oligarque russe ou un prince arabe. Malgré un récent ralentissement, le marché immobilier flambe toujours dans le quartier huppé de Dublin-4.
L'image de la France sortira toutefois indemne de ce coup porté à sa grandeur. La résidence britannique est aussi à vendre, pour seulement 8,7 millions d'euros. L'honneur est sauf.
Marc Roche
Article paru dans l'édition du 23.01.08.
On se réjouit évidemment d’une telle nouvelle: un frein aux dépenses indécentes des chancelleries françaises à l’étranger, un hola sur les gaspillages à but de faste des deniers publics, que l’on ne peut pas ne pas approuver.
Une action de l’omni-présidence forcément populaire... populiste ?
Car à y regarder de plus près, ne s’agirait-il pas encore d’une décision irréfléchie à l’emporte pièce, un gesticulage destiné à être visible et remarqué ? Qui irait de pair avec le désengagement de l’Etat du domaine culturel et éducatif à l’étranger, dégraissages et restrictions budgétaires à l’appui, ou la remise en cause des principes de TV5 Monde, qui plus qu’un vain outil de la francophonie est aussi le moyen le plus accessible pour les Français expatriés ou détachés qui le souhaitent de garder contact avec leur pays.
En Sarkosie il faut toujours voir plus loin que ce qu’on veut nous montrer...
Un énorme panneau " A vendre" est planté à côté du drapeau français depuis la semaine dernière à Dublin. S'il est vrai que nos ambassadeurs n'ont pas besoin de vivre dans des palaces on peut se demander si le moment est vraiment opportun de mettre en vente l'ambassade de Dublin, poste pilote d'une liste d'une vingtaine de résidences et autres batiments habritant nos centres culturels qui seront mis en vente.
Pourquoi attendre que l'immobilier en Irlande, comme partout dans le monde, soit en baisse pour se décider à vendre? Les caisses sont-elles si vides pour que l'on vende moins cher que ce que l'on pourrait obtenir? D'autre part, la France devrait assurer la dernière présidence française [de l'UE] (cela dépendra des Irlandais qui peuvent pérenniser le processus lors de leur vote [Référendum sur le Traité Modificatif] en mai prochain). L'activité à l'ambassade sera accrue et l'ambassadeur amené à beaucoup recevoir. Devra-t-il le faire dans la suite de l'hôtel où il sera hébergé?
J'ai écrit une lettre au responsable de l'immobilier au Quai [d'Orsay] pour plus de précisions.
Hélène Conway
Conseillère ADFE – Français du Monde