De retour de vacances et entre rentree des classes normale et rentree de la semaine de 4 jours en France, rentree des petits et plus grands dans leur uniformes rutilants que des familles ont encore galere pour payer dans l'indifference quasi generale en ces temps d'opulance ou qui n'a pas sa liasse de billets jaunes (50 euros, pour ceux qui n'en voient pas souvent) au chaud dans sa poche prete a etre degainee est forcement un feignant de base, je me colle au devoir de retour: Raconter vos vacances.
Eh bien je suis allee a Marseille, j'ai vu des nuages blanc et un peu de ciel bleu, l'air sentait incroyablement bon le pin et le fenouil sec, l'herbe etait jaune brule, les grappes lourdes de raisins et les figues gonflees de miel, les contrastes etaient saisissants, la colline etait rude et belle, la mer tres bleu, les soirees etaient douces et chaque soir le soleil caressait la mer dans de suaves reflets de roses, d'ocres et d'ors.
En chemin je me suis repue de Mediterranee en lisant Maissa Bey, qui raconte avec realisme et pudeur les femmes de l'Algerie (Cette fille-la) et Amin Maalouf dans une superbe evocation romanesque d'un Liban des Milles et une Nuits, et la formation de ses malheurs contemporains (Le Rocher de Tanios).
A Marseille le jour de mon arrivee j'ai ete accueillie par l'evenement le plus culturellement typique qui puisse dans mon quartier-village de
l'Estaque: les
joutes ! Pour qui ne connaitrait pas, je cite la societe de joutes des
Pescadou de l'Estaco:
Avec un coté folklorique mais surtout sportif, les joutes fondent les jeunes aux plaisirs du sport et rappellent un côté du tournoi chevaleresque qui plait tant aux marseillais. Et me resiste pas a l'envie de vous les presenter plus avant en photos.
A Marseille je suis allee "en ville" me ballader, respirer le parfum d'ailleurs des quais de la Joliette ou les bateaux a l'embarcadere forcent le reve et l'atome voyageur. La-bas la Corse, l'Italie, l'Algerie et la Tunisie...
Degustation de coquillages civilisee a Carry-le-Rouet. Deja le chic de la Riviera sur la rustre Cote Bleue.
Rapide tour des arenes et pause en terrasse dans l'attente fievreuse d'un concert de legende a Nimes...
A Marseille je n'ai pas pu contenir ma joie lorsque, en visite quotidienne chez ma meme, malgre des louveoiments concertes en famille, je n'ai pas echappe a un JT de TieffeOne et comble de bonheur, a des episodes des Feux de l'Amour. J'ai pu constater qu'entre le lundi ou je n'ai pu refrener ma curiosite et le mercredi de la semaine d'apres ou a la veille de mon depart j'ai tenu a organiser un piss taking de masse, parce que mieux vaut en rire qu'en pleurer, je n'avais pas perdu une miette des dialogues poulpitants qui se jouaient platement devant moi; que les personnages etaient assis sur les memes chaises, tramaient les memes complots, et se posaient les memes questions.
En ces temps de doutes et d'incertitude ou les Francais ne veulent que securite, stabilite et reconfort, j'ai ete heureuse, oooooh combien heureuse, de constater que TieffeOne, fidele a ses principes, continue a cultiver la beatitude des cerveaux.
De ca vous n'aurez pas de photos.
A Marseille j'ai siffle d'admiration devant le talent de gens comme Catherine Laborde, gourde professionnelle sur France Sarkozyste Television, qui a la fin de son interview de Mme Dati, la Ayrton Senna de la Reforme Judiciaire pour faire plaisir a son patron qui est en plus un ami qui l'emmene en vacances dans des residences payees par des industriels milliardaires vous parlez d'une independance du pouvoir de l'Etat !!, au terme d'une interview de la Ministre de la Justice donc, sur le theme de la loi sur la recidive, reussit par un miracle mediatique dont seuls les journalistes subtilement a la botte ont le secret, a evoquer la rapidite de l'action gouvernementale dur triste sieur Sarkozy, dont soudain le portrait moche est apparu en grand format derriere une Rachida a la machoire douloureuse de soudain tant sourire de trop d'honneur et de fierte de pouvoir louanger son bienfaiteur et le notre a tous, Saint Petit Pere du Peuple qu'il etait convenu, en cette minute emouvante, sur le JT de 13h du service public, de venerer comme il se doit.
A Marseille ce jour-la j'en croyais a peine mes yeux... et mes oreilles, que sur un sujet a priori serieux qui pouvait s'en passer, il nous a fallut glorifier l'efficacite, le style, la gentillesse et la grandeur de Sa Petitesse, comme si somme toute cela etait bien naturel.
M'ame Cecilia ne fut point evoquee. Car si on l'envoie en mission officielle liberer en grande pompe toute seule comme une grande les otages d'une longue operation diplomatique d'envergure internationale a portee strategique de defense et de securite vitale, Sa Petitesse l'a bien precise, il ne tolererait pas qu'on s'interesse a elle de facon privee. Point de glorification donc.
Point donc de photos non plus. IL a dit "C'est interdit".
Plus tard en quete de depaysement jetant un oeil sur RAI 3 je fus effaree de voir apparaitre sur l'ecran des images de Sarko en vacances (c'est un peu comme les Martine, mais en beaucoup plus chiant) illustrant la joie de la pulpeuse presentatrice JT qui annoncait que les Francais se fatiguaient du Monarque republicain et peu convaincue et degoutee par un torse moche et velu je me suis dit ne peut-on nulle part y echapper?! et arretons le massacre il est temps de rentrer... Au moins Bertie, lui, n'enleve pas le haut ! (ca couterait trop cher en fond de teint)
A Marseille je me suis dis que tout etait beau et magnifique et faisait vibrer delicieusement mon coeur. Les "retours" sont toujours merveilleux. Mais... blues de l'expatrie-e qui se sent avant tout voyageu-r/se en quete d'ailleurs est vite passe. Pour la premiere fois je me suis dis que j'aurai du mal a me resinstaller, a me readapter a la vie francaise, a la vie marseillaise. S'il le fallait bien sur un moindre effort suffirait mais... mais... jolie, jolie ma vie irlandaise... Simple blues de Sarkosie? De voir la France sur la mauvaise pente, sans plus rien de rien a offrir a qui est parti pour fuir en desespoir de cause ce pire qui est arrive? Peut-etre...
En chemin dans l'avion j'ai vu des beaufs grands crus facon les Bronzes en Irlande discutant le manque de pluie a Dublin, ou trop de pluie a Galway, trop de saussage and bacon les irlandais mangent gras aussi mal que les anglais, et tiens c'est marrant dans un village j'ai vu un fast food base sur le poisson (non, un fish & ships, vraiment?? j'avoue que j'ignorais que certains ignoraient et l'etonnement me rendant bete je me suis surprise a feliciter l'invention), et y'en a pas un qui parle francais pas facile pour se faire comprendre, etc.; j'en ai vu d'autres plus contents de leur decouverte culturelle; aussi des etudiants, ceux retournant vers le pays qu'ils ont aime pour un nouveau semestre ou un petit boulot ou visiter des amis, ceux qui y vont pour la premiere fois qui questionnent ceux qui savent un peu, me ramenant les uns et les autres au temps emotionnant de ma propre decouverte, que je contemple desormais en "vieille" habituee et avec une nostalgie attendrie (arf, je vieillis!); des irlandais en ballade toujours ravis d'avoir fait un sejour en France, a fortiori dans le Sud (avec une pointe de fierte je me demande s'ils ont pris le temps d'aimer un peu Marseille...), certains qui aimeraient bien y rester et parlent d'y retourner un jour pour toujours, car eux s'en fouttent pas mal de la Sarkosie, tandis que je retourne "chez moi", en Irlande :). Chacun son chez soi, pas forcement celui qu'on croit, toujours celui qu'on se choisit. Et parfois on en a deux.
Mais Back to reality: work, work, work ! Ici l'economie ralentit, on a du faire une erreur de calcul quelque part, vite, amasser avant que ca s'effondre !
Jusqu'aux prochain aller-retour.