mercredi 11 avril 2007

Feminitude et contradictions

Pas celle-la, pas maintenant. Une autre, plus tard. Si ce n'etait pas elle, je voterai sans hesiter!
Le fameux oui, je n'ai aucun probleme avec ca, mais...
Mais quoi?? Qui?? Quand??

Je discute beaucoup en ce moment avec des irlandais qui ont du mal a comprendre la vacuite des debats de la campagne, etant donne la delicate situation actuelle de la France.
Un ami me rappelait ce matin que la premiere irlandaise elue deputee l'a ete avant 1921: une comtesse anglo-irlandaise activement engagee dans la lutte pour l'independance, que la presidence est depuis 17 ans entre les mains d'une femme et que personne ne sous-estime aucune des deux avocates qui s'y sont succedees. Le machisme n'est pas irlandais, parole d'expat!
A toutes celles et tous ceux qui hesitent encore sans trop avoir pourquoi... Au final, chacun-e est libre de ses choix.

Ségolène et les "papas", par Benoîte Groult
LE MONDE 10.04.07 13h32 • Mis à jour le 10.04.07 13h33

Naïvement, après cinquante années de luttes pour l'égalité hommes-femmes et plus de cinquante ans après Le Deuxième Sexe, écrit par celle que l'on allait surnommer l'aïeule du féminisme, Simone de Beauvoir, je croyais la misogynie à bout de souffle. Une erreur à ne pas commettre si l'on veut comprendre ce qui se passe dans cette campagne hors normes que mène Ségolène Royal. Il aura suffi en effet qu'elle devienne la candidate du PS à l'élection présidentielle pour que refleurissent tous les clichés, les plaisanteries éculées qui se veulent désopilantes, et les grivoiseries bien françaises de la misogynie de papa.

(...) Elles ont assez surpris, venant souvent d'anciens ministres socialistes, pour être restées dans nos mémoires. Fabius, Allègre, Charasse l'ont paternellement mise en garde contre une ambition démesurée. D'autres se sont paternellement inquiétés : la femme est un être fragile, aurait-elle les nerfs ? la carrure ? Signalons qu'on n'ose plus parler de nerfs à propos de l'impavide Ségolène, dont Simone Veil a déclaré récemment respecter le grand courage : "Même physiquement, elle a un sacré tonus et incarne un symbole fort que je salue."

(...) Et pourtant, je voudrais débusquer un phénomène plus obscur et plus profond, qui s'articule au plus secret de notre inconscient, là où s'enracinent les fondements de nos comportements d'hommes et de femmes. On observe en effet un décalage troublant entre l'avalanche de sondages positifs qui ont salué l'apparition de Ségolène Royal dans cette campagne et les signes de crainte ou d'alarme qui sont apparus depuis peu dans l'opinion et qui se transforment chez certains - et certaines - en rejet d'une violence inattendue.

Comme si les Français s'apercevaient soudain qu'il est en train de se passer quelque chose de totalement inédit et qu'ils ne se sentaient pas mûrs pour l'accepter. Comme s'il s'agissait encore et toujours d'une transgression de notre vieille loi salique. L'expérience montre en effet qu'à chaque fois qu'une femme remet en question l'accord tacite qui réserve aux hommes les hautes fonctions du pouvoir, chaque fois qu'elle prétend s'intégrer par le haut dans des structures jusque-là masculines, apparaît un élément imprévu, qui ressortit à des pulsions archaïques, inavouées et inavouables, la renvoyant aux sources millénaires de son identité.

Or une élection présidentielle se joue en partie sur le symbolique. Et c'est parce que je ressens encore des traces de mon sentiment d'illégitimité en tant que citoyenne (on ne naît pas impunément en 1920 !) que je me pose une question : combien de femmes, au moment de glisser leur bulletin dans l'urne, vont-elles, mues par un atavisme de soumission, de confiance en papa, se décider finalement pour Sarkozy ? Ou pour Bayrou (bien qu'il ait une image moins "viriliste" et agressive) ? Combien d'hommes très fair-play qui ont affiché leur soutien à une femme vont finalement se rallier à un candidat "normal" ?

Une philosophe et une romancière ont très pertinemment décrypté le phénomène. "Je vois une angoisse machiste dans l'hostilité à la candidate", a écrit Sylviane Agacinski, dans son dernier livre. "Joli visage qui brigue le pouvoir, c'est excitant", note Pierrette Fleutiaux dans Libération. Le même visage en position d'y accéder, stop, danger !... Fondamentalement, une femme ne peut être que futile, dépensière, ignorante des vrais dossiers, même aux yeux de certaines femmes "hélas formatées pour penser contre elles-mêmes et contre leur sexe". Vous n'allez tout de même pas voter pour Ségolène parce que c'est une femme, me dit-on ? Ce serait de la misogynie à l'envers ! Et alors ? Il en serait temps. Nous avons subi la misogynie à l'endroit depuis tant de siècle sans protester ou si peu !

C'est parce que je suis née de sexe féminin que je n'ai été autorisée à voter qu'à 24 ans, en 1944. C'est parce que je suis née de sexe féminin que je n'ai pas eu le droit de rentrer à Polytechnique ou à l'Académie française (avant d'être une vieille dame), ni d'ouvrir un compte en banque sans l'autorisation d'un père ou d'un mari. C'est parce que je suis née de sexe féminin que j'ai publié mon premier livre sous le nom de mon mari, Paul Guimard, par modestie ou autodépréciation. Etre une femme m'a longtemps desservie dans la société en termes d'épanouissement et de réussite. Il me semble que la victoire de la "France présidente" serait un symbole fort. Le signe que nous sommes enfin majeures, des hommes comme les autres, et que nous ne nous considérerons plus comme le deuxième sexe.


Voir aussi: 8 Mars, Journee Internationale des Femmes: le combat continue

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Eh hop, me voici !
En réfléchissant bien d'ailleurs et sans pour cela en avoir mal à la tête, il n'y a pas 1 candidate féminine dans la course à la présidentielle... Il y a Dominique, Marie-Georges et Arlette... Pourquoi qu'on les oublie tout le temps ???
A vrai dire, ils nous prennent la tête ici en ce moment avec leurs sondages à 2 balles... Comme s'ils n'avaient pas compris ce qui s'est passé en 2002... Et c'est bien ce que je crains !! Résultat dans moins de 15 jours : ma valise est prête!! ;-)

Sandrine a dit…

On les oublie comme tu dis parce qu'elles ne "menacent" pas le territoire de chasse reserve des candidats males, ou "normaux", a la presidentielle. C'est la premiere fois qu'une femme est serieusement "presidentiable" et s'aventure a la tete d'un parti solide au mepris des hommes a qui le titre etait originellement destine. Les autres font de la figuration visiblement a en croire les reactions. De la politique mineure, comme les femmes l'ont ete trop longtemps.

Les sondages laisse tomber, c'est du n'importe quoi, j'ai mon petit post a faire la dessus. On nous prend pour des buses !

Faisons leur une surprise: votons intelligent. Ils nous prennent pour des moutons, ils ne s'y attendent pas du tout !

Anonyme a dit…

Tu prêches une convaincue...
Mais faut voir les sondages, du bourrage de crâne à grande échelle. Sans parler des reportages :France 3 l'autre soir: Mme "Duchmu"qui habite dans le Nord et va voter FN, comme ses voisins... pas parce qu'il y a "trop" d'immigrés dans sa cité mais parce que (elle sait pas trop pourquoi d'ailleurs)! Ca me hérisse le poil au plus haut degré... Elle n'a pas réfléchi une seconde aux conséquences pour elle-même Mme "Duchmu", avec un Le Pen, un Sarko ou un De Villiers comme président !!!
Puis il y a ceux qui ne l'avoue pas...
Depuis 2002, je ne fais plus confiance aux Français.

Sandrine a dit…

Oui tu as raison sur toute la ligne. On est dans une campagne extremement psychlogique. Le debat n'a pas sa place, tout ce qui compte, c'est de convaincre tout le monde que untel est le diable en personne. Et tant pis si on n'a pas d'arguments.

Les Francais gobent, mais je refuse de perdre confiance, de croire que le lavage de cerveau fonctionne bien qu'il soit flagrant. C'est mon naturel optimiste. Quand on n'a que l'amour chantait Brel. Quand on a que l'espoir... on refuse de le perdre :).

Tant de gens vont voter pour la premiere fois, de tous ages, en France et a l'etranger. Le scrutin est insondable, les sondages ne reposent sur rien, la propagande des egos brouille les pistes politiques pour s'y retrouver.

Au final il ne faut se laisser aller qu'a son instinct, ses convictions; ne pas se laisser influencer par une campagne de denigrement ou des commentaires tendancieux, le doute dans lequel on veut nous noyer. Je n'ai jamais vu autant de perversite generalisee dans une democratie digne de ce nom (a part aux USA mais, champions incontestes, ils sont hors concours depuis longtemps !!).

Vivement que ca finisse !

Anonyme a dit…

Oui, comme tu dis : vivement le résultat !
Là où je vote, il y a 200 personnes de plus d'inscrites sur la liste électorale (j'ai comparé avec l'ancienne carte qui date de 2004 et le N° sur la liste électorale qui m'est attribué). Cela ne peut pas être que des nouveaux "habitants"...