LE MONDE 30.04.07 14h01 • Mis à jour le 30.04.07 17h23
Pour la première fois dans l'histoire de France, une femme est aujourd'hui en situation de conquérir démocratiquement le symbole même du pouvoir politique qu'est l'Elysée. Si Ségolène Royal est élue le 6 mai, elle deviendra, par la grâce du suffrage universel, celle qui présidera le conseil des ministres, la chef des armées, l'inspiratrice de la politique internationale et la garante de l'indépendance de la magistrature, toutes fonctions longtemps réservées aux hommes. "Femmes de France, prenons la dernière Bastille !", proclament plusieurs organisations de femmes qui appellent à un rassemblement festif en faveur de Ségolène Royal, mardi 1er mai, à la Bastille.
En France, les femmes ont acquis le droit de vote très tardivement : il a fallu attendre l'ordonnance signée à Alger, le 21 avril 1944, par le général de Gaulle, pour qu'elles "soient électrices et éligibles dans les mêmes conditions que les hommes".
En France, les relations entre les femmes et la politique ont longtemps été marquées par des rendez-vous manqués.
Pendant l'entre-deux-guerres, alors que tous ses voisins se convertissaient peu à peu au droit de vote des femmes, la France avait préféré tergiverser : de 1919 à 1935, cinq textes de loi avaient été examinés par la Chambre des députés mais tous avaient été mis en échec par le Sénat. En 1936, lors du Front populaire, le gouvernement de Léon Blum avait fait un geste en accueillant, pour la première fois, trois femmes, mais le droit de vote avait une nouvelle fois été repoussé : Irène Joliot-Curie, Suzanne Lacore et Cécile Brunschvicg étaient devenues sous-secrétaires d'Etat à la recherche scientifique, à la santé publique et à l'éducation nationale, mais elles n'avaient pas gagné pour autant le droit de participer aux élections...
En France, la parité est donc loin de couler de source.Malgré ces réticences, et dans tous les pays du monde, les femmes s'imposent peu à peu sur la scène politique : en 2007, la part des femmes dans les Parlements (17 %) a atteint un record historique. Si Mme Royal est élue présidente de la République, elle rejoindra, le 6 mai, le club - encore très fermé - des sept femmes chefs d'Etat de la planète : Michelle Bachelet (Chili), Tarja Halonen (Finlande), Michaëlle Jean (gouverneure générale du Canada), Mary Mc Aleese (Irlande), Vaira Vike-Freiberga (Lettonie), Ellen Johnson Sirleaf (Liberia) et Gloria Arroyo (Philippines). Le club des femmes chefs de gouvernement, auquel appartient Angela Merkel, ne compte aussi que sept membres.
La France, les femmes et le pouvoir.
1. l’invention de la loi salique (Ve-XVIe siècles), paru en 2006
2. Le verrouillage du système (XVIIe-XXIe siècles), a paraitre en 2007
Eliane Viennot, historienne.
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